Julien Gerbi (Alg): Inchallah la formule 1Julien GERBI : « Mon rêve est d’être le premier Algérien pilote de F1 » C’est d’alicante, dans le sud de l’Espagne, que le pilote de course Algérien, Julien Gerbi, à accepté de répondre à nos questions. Julien Gerbi est dans le sport Algérien, une sorte « d’OVNI » car il pratique un sport qui habituellement est l’apanage de quelques familles fortunées à travers le monde, la course automobile. Après avoir réussi avec mention son passage en formule 3, Julien essaye de boucler son budget, comme il l’a toujours fait, « à la débrouille », afin de disputer une saison de formule 2 qui lui ouvrirait les portes du « graal » de la formule 1. Le rêve de Julien Gerbi : être le premier pilote Algérien à conduire une monoplace sur un circuit de formule 1.
Le Temps : Julien Gerbi, les férus de sport automobile vous connaissent, mais pouvez vous, dans un premier temps, vous présenter au reste du peuple Algérien qui ne vous connait pas encore ? Julien Gerbi : Merci dans un premier temps de me donner la parole dans votre journal et bonjour déjà à tous vos lecteurs. Je m’appelle Julien Gerbi, j’ai 25 ans et je suis dans le sport automobile depuis 2003. Je n’ai pas pu faire de Karting, la voie normale et quasi obligatoire des apprentis pilote, car on ne pouvait pas se le permettre dans la famille. Moi j’ai commencé directement dans ce qu’on appelle une monoplace. Ensuite j’ai appris le métier et progressé étape par étape depuis mes débuts en Championnat d'Europe de Sport Prototypes en 2004 jusqu’à mes derniers essais en formule 3000 où j’ai battu les temps du Champion d'Europe de F3000 et des pilotes d'essais F1 qui étaient présents ce jour-là.
Le Temps : Pouvez-vous nous détailler un peu votre parcours professionnel dans le sport mécanique pour qu’on se rende mieux compte des différentes étapes qui vous ont mené là où vous êtes aujourd’hui, c'est-à-dire à un pas de la fameuse formule 1 ? Julien Gerbi : Et bien comme je vous l’ai dit, j’ai vraiment fait mes débuts dans une monoplace, puis ensuite j’ai du partir un an en Turquie pour pouvoir courir en Formule 3, deux ans au Etats Unis pour continuer à courir en monoplace, avant de revenir en Europe pour courir en Angleterre et pouvoir faire des essais en formule 2 et en formule 3000. Pour ceux qui connaissent, ma première compétition professionnelle, c’était le Championnat d'Europe de Sport Prototypes, puis ensuite la Formule BMW espagnole, pour arriver à l’année charnière pour moi, l’année 2006 où j’ai vraiment commencé à toucher mon rêve avec ma signature en Formule 3. Pour ma première course, je suis parti de la dernière place et j’ai remporté la victoire, à seulement 21 ans. Une 2006 qui me rapportera 3 victoires et 5 podiums en 8 courses. Grâce à ce magnifique parcours en Formule 3, j’apparais, début 2007, dans le classement mondial des 100 meilleurs espoirs, au milieu des Hamilton, Vettel et Piquet Jr. Je décide alors de quitter l'Europe pour les Etats-Unis, où mes finances me permettent de courir en US Barber Mazda Series que je quitterai à la 4ème place sur 95 pilotes avec 10 podiums en 14 courses, 2 ans plus tard en 2009 où j’ai la possibilité de revenir en Europe pour concourir en Formule 3 Britannique et où j’ai l’opportunité de faire des essais en Formule 2 et en Formule 3000. Le Temps : Julien, j’ai presque envie de vous dire : « La formule 1, c’est pour quand ? » Julien Gerbi : C’est vrai que je suis actuellement, dans les catégories justes en dessous, qu’on appelle aussi les catégories « antichambre de la F1 », que sont la formule 2 et le GP 2. Moi j’ai couru et je me suis testé dans les voitures de ces catégories là et maintenant mon objectif c’est d’y courir afin d’y obtenir des résultats pour espérer passer en Formule 1. Le Temps : Boucler le budget d’une monoplace pour courir dans un circuit est très difficile, n’avez-vous jamais eu la tentation du Rallye, où les budgets sont quand même inferieurs à ceux d’une monoplace ?
Julien Gerbi : J’ai toujours suivi le rallye, comme tout le monde, d’un peu loin, mais en ce qui me concerne, mon truc ça a toujours été le circuit, la monoplace et pourquoi pas un jour la F1. L’an dernier je courais dans une monoplace de 360 chevaux, en formule Palmer Audi qui ressemblait beaucoup à une F1, mais pour un jour accéder à la F1, il faudra que je participe au championnat GP2 ou Formule 2. Le Temps : Le fait de ne pas avoir fait de Karting, vous handicape t’il aujourd’hui par rapport aux autres pilotes ? Julien Gerbi : Le karting c’est essentiel car cela vous enseigne la « bagarre » en course avec un pilote proche de vous sur le circuit, observer et guetter ses failles, freiner plus tard que lui ect… Cela apprend aussi l’endurance d’une course très longue et très difficile. Sinon sur le plan de la technique, à part l’usure des pneus, une monoplace c’est vraiment différent d’un Karting. Le Temps : Vous revendiquez partout votre Algérianité, à chaque fois que l’occasion vous est présentée. Pouvez-vous nous parler un peu de vos origines ?
Julien Gerbi : Les origines Algériennes viennent de ma mère. J’ai essayé de faire mon arbre généalogique et le plus ancien ancêtre que j’ai trouvé habitait la région du MZAB (wilaya de Ghardaia) vers les années 1700. Ensuite ma famille a quitté le Mzab pour immigrer à Alger, Oran et Tlemcen. Le Temps : Vos parents vous ont t’ils encouragé dans la voie du sport automobile ? Julien Gerbi : En ce qui concerne mes parents, j’ai eu droit au traditionnel : « Passes ton bac d’abord ! », conseil que j’ai suivi puisque j’ai obtenu mon bac littéraire. Une fois que j’ai obtenu mon bac, j’ai dit à mes parents que je voulais faire de la course et que c’était ma seule passion. Ils ont vu que j’étais sérieux et m’ont aidé à démarcher des sponsors pour boucler mon premier budget. Et depuis je n’ai jamais arrêté. Le Temps : En ces temps de crise économique et de rigueur budgétaire, comment Julien Gerbi fait-il pour trouver des sponsors pour continuer à courir ? Julien Gerbi : Je crois que vous venez de mettre le doigt là où ça fait mal. C’est le problème de ce sport. Si vous n’avez pas le budget et suffisamment d’argent pour pouvoir faire des essais pour connaitre sa voiture et connaitre les circuits, vous êtes désavantagé par rapport à ceux qui ont les moyens de le faire. Mon idée, ça a été de créer un programme d’investissement privé, où en fait des particuliers peuvent investir sur ma carrière en me soutenant avec la somme de leur choix, en échange d’un intéressement sur ma carrière et mes primes lorsque je fais des bons résultats ou si je décroche un gros contrat publicitaire. L’intéressement destiné à ceux qui investissent sur moi est de 50% en cas de gains. C’est surtout cet initiative qui ma aidé à survivre car trouver des sponsors dans le monde de l’entreprise c’est devenu mission impossible sans contact préalable d’un intermédiaire. Le Temps : Un autre Algérien qui faisait du sport automobile, Nassim Sidi Saïd, avait pas mal de sponsors Algériens comme la société phare des entreprises Algérienne, la Sonatrach. Pas vous ? Julien Gerbi : Comme je vous l’ai dit, hormis les particuliers, je n’ai aucune entreprise Algérienne dans mes partenaires. Mais si une ou plusieurs entreprises de mon pays est intéressée par mon projet d’être le premier pilote de Formule 1, elle est la bienvenue et peut se rapprocher de moi à travers la rubrique contact de mon site web juliengerbi.com . Le Temps : Est-ce que les meilleurs pilotes sont en formule 1 ? Julien Gerbi : Les pilotes qui gagnent en formule 1 sont les meilleurs pilotes. Après, il ya une autre catégorie de pilotes qui courent dans les toutes petites écuries, qui ont souvent besoin de fonds et qui là, ne sont pas forcément les meilleurs pilotes mais surtout des pilotes fortunés où amenant un budget avec eux qui va permettre à l’écurie de boucler son budget, en échange d’un volant. Le Temps : Vos concurrents sont-ils des passionnés débrouillards comme vous, où des passionnés « bien nés avec une cuillère d’argent dans la bouche » ? Julien Gerbi : Honnêtement dans les catégories dites de promotions, où je me trouve, ils sont pour la plupart originaires de bonnes familles qui ont les moyens financiers. Cela devient de plus en plus dur pour les gens comme moi car plus vous montez de niveau et plus les budgets explose car il faut plus d’essais et donc plus de mécanique. Juste un chiffre, un budget de Formule 2, avec les déplacements et le budget accident, c’est 1 million d’euros, ce n’est pas à la portée de tout le monde. C’est d’ailleurs mon problème cette année. J’avais fait des essais concluants en Formule 2, mais je n’ai pas pu participer au championnat de F2 2010 parce que je n’ai pas réussi à réunir le budget. Le Temps : Pour la prochaine saison, qui débute en Mars 2011, avez-vous réuni le budget pour enfin concourir en F2 ? Julien Gerbi : C’est en cours, et j’espère réunir ce budget pour disputer le championnat de F2 car le vainqueur de ce championnat aura le droit à des essais dans l’écurie Williams. Sinon j’ai d’autres propositions en super tourisme et en endurance pour me consoler. Le Temps : Combien perdez vous de kilos par course ? Julien Gerbi : Dans ma catégorie, où la course dure moitié moins qu’une course de F1, on peut perdre jusqu’à 2 kilos par course. Comme on dispute 3 courses par weekend end, si on oublie de s’alimenter correctement on peut perdre trois fois deux kilos par course. En formule 1, avec la chaleur on peut perdre jusqu’à 7 kilos par course. Le Temps : Quelle est la vitesse maximum que vous avez déjà atteint ? Julien Gerbi : 320 kilomètres /heure, ça passe très vite et le virage arrive très vite. On passe de 0 à 100 km/heure en deux secondes cinq. Le Temps : Avez-vous un agent ou un manager qui gère vos affaires ? Julien Gerbi : A une époque, j’ai eu quelqu’un qui s’occupait de mes affaires, puis mon expérience fait qu’aujourd’hui je préfère tout gérer seul de A à Z. La recherche de sponsors, la gestion de mon site internet mais aussi les négociations avec la presse pour les interviews les télés ect… Le Temps : On va croiser les doigts et souhaiter que vous soyez le premier pilote Algérien en formule 1 Julien Gerbi : Merci, je l’espère de tout cœur, l’Algérie est présente tous les jours à mes côtés. Il n’ya jamais eu de pilotes de formule 1 Algérien et mon plus grand rêve serai de conduire une monoplace avec sous mon nom, enfin notre drapeau vert blanc et rouge. Entretien réalisé par Mohamed BOUGUERRA |
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