près quelques semaines de présence à la tête des Fennecs, Abdelhak Benchikha, le sélectionneur algérien a bien voulu livrer, en exclusivité pour Footafrica365, ses impressions sur son poste, sa mission et son regard sur le football de son pays. Le général nous dit tout !

Reconnu au Maghreb, vous l’êtes beaucoup moins pour le grand public en Europe. Qui est l’homme qui a succédé au monument Rabah Saâdane ?
Je suis entraîneur de football. Et je ne sais faire que ça. J’ai un bac plus 7 en méthodologie du football à l’ISTS (Institut des Sciences et Technologies du Sport.). Après avoir été moi-même athlète de performance, j’ai entamé ma carrière d’entraîneur. J’ai entraîné des clubs algériens avant de prendre en main aussi le Club Africain de Tunis. Avant ma nomination, j’étais l’entraîneur de l’équipe A’. Je suis aussi instructeur FIFA et CAF. Dans mon esprit, c’est un plan de carrière réfléchi et choisi. Etre à la tête de l’Algérie, c’est un rêve qui se réalise et une consécration de 40 ans de vie sportive.

Après la démission de Rabah Saâdane, le recrutement d’un grand entraîneur étranger a encore été évoqué, l’Algérie a-t-elle un problème avec l’apport de compétences extérieures ?
Je ne crois pas que ça soit la bonne lecture. Je ne suis pas contre une contribution extérieure qui puisse aider notre football. Cependant, l’histoire nous donne certaines réponses à cette question. L’Algérie s’est qualifiée trois fois à la Coupe du monde avec des entraîneurs du cru. La seule CAN que nous avons gagné en1990 et le fruit d’un staff technique algérien. Le choix des compétences locales est un facteur historique et culturel. Nous avons des bons entraîneurs, qui reçoivent une formation robuste et solide. 

Au moment de votre nomination, vous avez souhaité conserver votre poste avec l’équipe A’. Pourquoi ce choix ?
C’est tout à fait normal. Ce sont mes poulains. J’ai travaillé avec eux, et ensemble nous avons réussi à qualifier l’Algérie pour la première fois au CHAN (Championnat d’Afrique des nations, auquel seuls les joueurs évoluant sur le continent africain peuvent participer, ndlr). Ils représentent l’avenir de l’Algérie. Et puis c’est l’antichambre de l’équipe A, ça me permet directement de suivre l’évolution des joueurs. Certains peuvent ensuite dans l’avenir aspirer à l’équipe A.

L’équipe mondialiste était quasiment composée que de joueurs évoluant en Europe, les joueurs du Championnat d’Algérie sont ils compétitifs à haut niveau ?
Je pense que la pâte existe. Ils ont besoin de considération. Le football reprend progressivement ces droits en Algérie. Pour les raisons que vous connaissez, le football n’était plus une priorité pour l’Etat. Aujourd’hui, les choses sont en train de changer. Des clubs comme l’ES Sétif ou la JS Kabylie reviennent au premier plan continental. Cette saison, le premier Championnat professionnel a été lancé. Et plus globalement, il y a une forte volonté étatique pour que le football se développe en Algérie.

Votre prise de fonction a été marquée par un sérieux revers en Centrafrique (2-0), comment expliquez-vous cette défaite ? Et pensez-vous que l’Algérie puisse encore  espérer se qualifier pour la CAN Orange 2012 ?
Je suis d’un naturel positif, et malgré cette défaite, nous allons tout faire pour prendre les 12 points restants. Sur le match, on a perdu trop de duels. C’est clairement une défaite collective. Ce qui compte pour moi, c’est de protéger mes joueurs. Les conditions climatiques étaient effectivement difficiles. Nous avions huit mondialistes absents ainsi que plusieurs blessés. C’est important et ça remet en question l’équilibre d’une équipe. A la fin de la rencontre, mes joueurs étaient abattus. Ils sont venus me voir dans ma chambre pour s’excuser et me dire qu’ils étaient très tristes car eux voulaient absolument gagner ce match pour moi.

« Mourad Meghni est un pion essentiel »

Le 25 mars prochain, vous affrontez le Maroc, l’autre favori du groupe avec l’Algérie. Comment appréhendez-vous cette rencontre ?
Je vous arrête tout de suite ! Dans ce groupe, il n’y a pas de favori ou de gros morceau. La Centrafrique nous a battu et a tenu en échec le Maroc. Alors, il faut arrêter de rêver. Nous sommes prisonniers de notre passé. L’Afrique du Nord s’est endormie pendant que le reste du continent a continué à progresser. La géographie du football a changé. 

Connaissez-vous cette sélection marocaine et que pensez-vous de l’arriver d’Eric Gerets à sa tête ?
Bien évidemment que je connais le Maroc. C’est un pays frère et ce sont nos voisins. C’est une équipe avec des grands talents. En revanche, je ne peux pas me prononcer sur les points forts et faibles de cette équipe. Quant à Eric Gerets, c’est un entraîneur reconnu qui a fait ses preuves. Mais ce que je crois, c’est que ce sont les joueurs qui font l’entraîneur et pas le contraire.

Solide défensivement, l’Algérie est une équipe qui ne marque pas beaucoup de buts. L’Algérie manque-t-elle d’un Chamakh ou un El Hamdaoui dans son équipe ?
Je ne pense pas que ça soit un problème de qualité de nos joueurs. Djebbour est efficace en club. Il marque régulièrement. Je crois que nous avons un problème d’animations offensives. On juge un attaquant au nombre d’occasions qu’il se procure. Et à ce niveau là, nous devons progresser. Mais c’est un problème qui n’est pas évident à résoudre. Je suis prisonnier des dates FIFA et du temps imparti pour regrouper les joueurs. Le temps est mon ennemi, je vais disposer de quatre jours jusqu’au match du Maroc pour notamment travailler cet aspect. 

Absent depuis plusieurs mois, comptez-vous sur le prochain retour de Mourad Meghni ?
Absolument, c’est un pion essentiel, un cadre et une tête pensante sur le terrain de notre équipe. Mais c’est aussi le cas pour Karim Matmour, Foued Kadir, Adlène Guedioura ou Chadli Amri dont j’attends le retour. Pour la prochaine rencontre amicale, je suis heureux du retour de Karim Ziani…

Que pensez-vous de l’apport des joueurs franco-algériens au Championnat ?
C’est une bonne nouvelle. Car chaque équipe ne peut recruter deux joueurs étrangers. Ca nous permet d’avoir un apport extérieur complémentaire. Et quand on voit des joueurs comme Lemmouchia, il est clairement de qualité pour notre Ligue. Tactiquement, ils sont souvent bien formés. 

Au moment où le Maroc récupère des Aït Fana, Belhanda ou des Carcela, l’Algérie a dû mal à convaincre des Feghouli, Tafer ou Brahimi de la rejoindre. Pourquoi ? 
C’est une question embarrassante. Déjà, il ne faut pas oublier que c’est l’Algérie par l’intermédiaire et son président Mohamed Raouraoua qui a été à l’initiative de la loi sur le changement de sélection nationale pour les joueurs binationaux. La porte de la sélection algérienne est ouverte à tous les joueurs qui veulent représenter ses couleurs. Ces joueurs ou d’autres sont les bienvenus. Nous préférons leur laisser le temps de la réflexion. Ce sont des jeunes joueurs qui ont eu aussi besoin de finir leur formation avant de se déterminer. Nous avons bien évidemment pris contact avec certains.

Lesquels ? Le nom du Toulousain Tafer circule avec insistance…
Je ne confirme pas cette information. Et pour l’instant je ne communiquerai pas sur ce sujet.